Il faut dire ce qui est : Severus Rogue est un personnage vraiment déplaisant. Injuste, cruel, malveillant, partial… la liste de ses défauts est kilométrique, au contraire de celle de ses qualités (d’ailleurs, en a-t-il ne serait-ce qu’une seule ?), mais c’est aussi un personnage très charismatique qu’on aime détester, à l’instar de nombreux autres (Drago et Lucius Malefoy par exemple).
Même s’il existe des circonstances atténuantes à son comportement (l’attitude déplorable de James Potter à son égard du temps de leur scolarité à Poudlard), nous avons tous été révoltés de son attitude injuste et méchante envers Harry en tout lieu (en cours, dans les couloirs…) et à tout propos dans les cinq premiers tomes.
Dumbledore a beau avoir confiance en lui, nul (que ce soit personnage ou lecteur) ne peut oublier qu’il fut un Mangemort, et personne ne peut s’empêcher de penser que s’il a changé de camp une fois, il est très capable de recommencer. Cette certitude persiste tout au long des cinq opus, et les divers rebondissements qui y surviennent, , ne font que conforter cette pensée. Cependant, persiste également la conviction que ce personnage sombre et inquiétant cache quelque chose, et que son rôle est bien plus important qu’il ne le paraît.
En effet, le poser en simple persécuteur de Harry est bien trop simple, et le placerait en vulgaire faire-valoir du jeune sorcier. En cela, le tome 6 se révèle éclairant, puisqu’on y découvre Rogue sous un nouveau jour : il a gardé des contacts avec des Mangemort actifs, et protège Drago (c’était déjà une évidence dans le premier livre, mais on découvre dans cet opus jusqu’où s’étend cette protection) chargé par Voldemort de tuer Dumbledore. Alors, on pourrait croire (c’est d’ailleurs ce que pensent nombre de personnages) qu’il s’agit d’une couverture destinée à cacher qu’il protège l’école, les élèves et le directeur, mais cette idée s’envole dès qu’on le voit s’opposer à Harry, baguette en main et Sortilèges Impardonnables en bouche ; dès qu’on le voit tuer Dumbledore avec un Avada Kedavra sans appel.
Cependant, passé le sentiment de colère et de tristesse qui nous submerge lorsqu’on réalise la mort de cet important personnage, si on observe cette scène avec attention, on remarque la dernière réplique du directeur avant sa mort. En effet, désarmé par Drago et menacé par Rogue, il dit « Severus… s’il vous plaît… », comme s’il demandait à Rogue de le tuer. Et, du reste, il se laisse effectivement tuer sans rien tenter pour se défendre.
A cet instant, le lecteur abasourdi s’interroge : pourquoi ? Et les théories les plus diverses prennent naissance dans son esprit, ainsi que les comparaisons les plus étranges. Le plus étrange de ces parallèles où le personnage puissant se laisse terrasser sans réagir par son ennemi, renvoie à la fin de l’épisode IV de la saga Star Wars, dans lequel le sage Obi-Wan Kenobi se laisse tuer par Dark Vador afin de pouvoir mieux aider Luke Skywalker par la suite. Là, l’esprit du lecteur raisonne à toute vitesse : et si en se laissant tuer, en demandant à Rogue de le tuer, Dumbledore lui aussi avait en tête d’aider plus efficacement Harry plus tard ? Et si, donc, Rogue avait agi, non sur ordre de Voldemort, mais sur les instructions de Dumbledore lui-même ? Car il faut bien avouer que le comportement nouveau de ce dernier contraste très fortement et est parfaitement illogique par rapport à son attitude des cinq premiers tomes où il se battait de toutes ses forces et de toutes les façons possibles.
Mais on a beau échafauder des explications plausibles, il est bien évident qu’aucun de nous ne peut connaître les véritables raisons, et nous devrons faire preuve de patience avant de pouvoir obtenir les réponses que ne manquera pas de nous donner le septième et dernier tome. Tous est entre les mains de J.K Rowling.